Le bois coupé au début de l'hiver est entreposé
pendant un an. Après la foire au bois de Château-Chinon
qui a lieu à la Toussaint, les bûches sont marquées
par martelage. En amont des rivières des barrages
ont été construits. L'eau accumulée est brusquement
lâchée créant un flot dans lequel les bûches sont
précipitées. Elles atteignent ainsi le point
de rassemblement, c'est le petit flot. Les "poules
d'eau", montés sur les bûches, et les "cantonniers",
à terre, permettent le franchissement
des obstacles à l'aide de crocs.
Au printemps, la même opération, appelée à présent
grand flot, conduit les bûches à Clamecy ou Vermenton.
Les "triqueurs" récupèrent les bûches
et les trient en fonction de leurs marques avant de les empiler.
Pendant l'été, période de chômage, ont lieu des
joutes qui permettent de désigner le "roi-sec" qui
sera pour un an le chef des flotteurs.
A la fin de l'été, alors que le niveau de l'eau remonte,
des trains sont constitués. Les bûches
sont assemblées sous la responsabilité
du "flotteur" qui sera responsable du
transport. Pour cela, il est assisté d'un "tordeur"
(chargé de préparer les coupons avec les grosses bûches
et de les lier avec les rouettes), d'un "approcheur"
(chargé de l'approvisionnement en bois), d'un "garnisseur"
qui consolide les coupons en y introduisant de petits morceaux de bois
avec un maillet et de deux "compagnons" (l'un est chargé
de consolider l'assemblage du coupon, l'autre assemble les coupons
entre eux. Ils construisent les coupons qui sont ensuite assemblés
de la manière suivante : sept coupons et deux labourages
(coupons avant et arrière) constituent un demi-train.
Un train entier représente environ 200 stères de bois, soit
200 m3.
Un nouveau lâché d'eau, "l'éclusée",
lance le train en direction de Paris. Le flotteur est debout à l'avant
du radeau, tenant en main sa perche. Un apprenti, installé à
l'arrière, l'aide pour la partie du trajet la plus difficile, c'est
à dire le début. Le train mettra une quinzaine de jours pour
atteindre Paris. Le flotteur aide au franchissement des obstacles, de jour
comme de nuit, car le train ne s'arrête jamais.
Vers la fin du voyage, les trains sont parfois halés par des chevaux
pour atteindre les ports de Charenton ou de Bercy où ils seront démontés.
Le flotteur regagnera à pied son Morvan natal en quatre jours.
Du XVIème jusqu'au début du XXème
siècle, l'exploitation des quelques 50.000 ha de forêts du Morvan
a permis d'alimenter Paris en bois de chauffage. La concurrence du charbon
comme combustible, des bateaux et du chemin de fer comme moyen de transport
ont mis fin au flottage. Après la disparition des trains de bois, le
flottage à bûches perdues a continué jusqu'en 1923 sur
l'Yonne et 1927 sur la Cure.